L’eau, trésor de la permaculture tropicale au Togo
DESIGNINNOVATIONBIODIVERSITÉARBRES
Stéphane Walger


Dans les climats tropicaux, la gestion de l’eau est un enjeu crucial : les pluies peuvent être torrentielles puis laisser place à de longues périodes sèches. Les techniques de permaculture offrent des solutions efficaces pour capturer, stocker et distribuer l’eau de pluie tout en nourrissant le sol. Ce deuxième article explore trois approches complémentaires – collecte de l’eau de pluie, swales et design keyline – que vous pouvez intégrer dans votre ferme au Togo en vous inspirant de l’expérience d’Aménopé.
🌧️Collecte de l’eau de pluie
Avant même de modeler le paysage, la première étape est de collecter l’eau de pluie. L’organisation UN‑Habitat souligne que l’approvisionnement en eau douce reste limité pour de nombreux habitants des régions tropicales, et que le recours à l’eau de pluie est une solution écologique et décentralisée. La collecte de pluie consiste à capter l’eau qui tombe sur les toits ou des surfaces aménagées et à la stocker dans des réservoirs ou des citernes. Cette pratique, vieille de plus de 4 000 ans, est particulièrement pertinente là où les réseaux de distribution sont inexistants ou peu fiables.
Comment faire ?
Installez des gouttières sur vos toits et dirigez l’eau vers des barils ou des cuves de stockage. Les toits en tôle galvanisée sont très efficaces, mais l’on peut utiliser des feuilles de cocotier tressées ou des bâches temporaires.
Filtrez grossièrement l’eau à l’entrée (grillage ou filet) pour empêcher les feuilles de boucher la cuve.
Placez les cuves sur un support surélevé pour bénéficier d’une distribution par gravité vers le potager.
Protégez-les de la lumière pour éviter le développement d’algues.
À la ferme Aménopé, l’eau de pluie est utilisée pour abreuver les animaux et irriguer les jeunes plants pendant la saison sèche. Le surplus est restitué au jardin via un réseau de rigoles, montrant qu’une gestion intégrée est possible même dans un environnement rural.
Les swales : ralentir et infiltrer l’eau
Un swale est une tranchée peu profonde creusée suivant la ligne de niveau (contour) avec une butte en contrebas. Cette forme capture l’eau de pluie, la ralentit et l’infiltre uniformément dans le sol, réduisant l’érosion et rechargant les nappes. Comme le souligne Tenth Acre Farm, un swale est préférable sur des pentes douces ; il est moins adapté aux terrains escarpés ou aux régions très pluvieuses où l’excès d’eau risquerait de saturer le sol. Les swales offrent plusieurs avantages : atténuation du ruissellement, création d’écosystèmes humides, facilité d’installation comparée aux citernes et possibilité d’intégrer des arbres fruitiers sur la butte. Bill Mollison rappelait que « des solutions simples peuvent résoudre des problèmes complexes »; les swales illustrent bien cette philosophie.
Réalisation d’un swale :
Tracer la ligne de niveau à l’aide d’un niveau à bulle ou d’un niveau A.
Creuser un fossé de 30–50 cm de large et 20–30 cm de profondeur. La terre excavée est placée en aval pour former une butte.
Planter des arbres et des herbacées sur la butte pour stabiliser le talus : au Togo, des bananiers, papayers ou gliricidia peuvent y trouver leur place.
Pailler le fond du swale avec du bois mort ou des feuilles pour améliorer la rétention et l’infiltration de l’eau.
Une succession de swales parallèles à flanc de colline agit comme des éponges qui retiennent l’eau de pluie et l’acheminent doucement vers les zones cultivées. Si votre terrain est très pentu, il vaut mieux installer des terrasses ou combiner swales et talus plantés. À Aménopé, on a creusé de petits swales autour des vergers pour capturer l’eau et éviter que la pluie ne lessive le sol.
Le design keyline : orchestrer l’eau à l’échelle du paysage
Le Keyline design a été développé par l’agriculteur australien P.A. Yeomans pour régénérer les pâturages dégradés par l’érosion. L’idée centrale est de capter l’eau au point le plus haut du terrain et de la redistribuer uniformément sur les crêtes, contrariant le mouvement naturel vers les vallées. Le keyline repose sur plusieurs éléments :
Le point clé (keypoint) : c’est l’endroit où la pente change de convexe (crête) à concave (vallon). Ce point marque la naissance d’un cours d’eau et sert de repère pour tracer le keyline.
La ligne clé (keyline) : c’est la ligne de niveau qui passe par le point clé et qui guide la direction des sillons ou des tranchées. On creuse légèrement hors du contour afin de forcer l’eau à se déplacer vers les crêtes plutôt que vers les vallées.
Le keyline plow : un outil à dents fines qui décompacte le sol en profondeur sans le retourner, facilitant l’infiltration de l’eau et la remontée de matière organique.
La mise en œuvre consiste à dessiner les keylines sur l’ensemble de la ferme, à labourer selon ces lignes avec le keyline plow, et à installer des étangs ou des mares aux intersections pour stocker l’eau. Cette approche réduit l’érosion, améliore la fertilité des sols et crée une irrigation gravitaire naturelle. Bien que le keyline soit plus complexe à réaliser que les swales, il est pertinent pour des surfaces plus grandes ou des projets agroforestiers comme ceux d’Aménopé.
Combiner les approches : un système intégré
Au Togo, où les saisons alternent entre pluies abondantes et sécheresse, combiner plusieurs techniques donne les meilleurs résultats. On peut :
Collecter l’eau de pluie sur les toits pour répondre aux besoins immédiats (cuisine, animaux, pépinière).
Installer des swales sur les pentes douces pour recharger le sol autour des cultures et des vergers.
Appliquer le design keyline sur les grandes parcelles ou les projets de reforestation afin de redistribuer l’eau et créer des micro‑barrages en haut des crêtes.
Planter des haies vives et des arbres le long des lignes d’eau pour stabiliser les sols et favoriser la biodiversité.
Intégrer l’élevage pour récupérer les nutriments (fumier) et gérer la végétation par pâturage tournant comme le fait Aménopé.
Conseil pratique : commencez petit : un seul swale, une petite cuve de récupération d’eau, un premier keyline expérimenté sur une parcelle. Observez comment l’eau circule et s’infiltre. Ajustez en fonction des pluies, du relief et des plantes. Graduellement, votre système deviendra de plus en plus résilient et efficace.
Conclusion
La gestion de l’eau en permaculture tropicale nécessite une compréhension fine du paysage et du climat. En utilisant des techniques complémentaires – collecte des pluies, swales et design keyline – vous pouvez transformer les excès d’eau en ressource et passer les saisons sèches sans stress. La ferme Aménopé illustre la faisabilité de ces approches dans le contexte togolais : leurs rigoles, cuves, étangs et cultures en buttes montrent qu’une gestion intelligente de l’eau est à la portée de tous. En adoptant ces techniques simples mais puissantes, vous contribuerez à restaurer les sols, augmenter la biodiversité et assurer la sécurité alimentaire de votre communauté.
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Aménopé is a permaculture mixed-culture and livestock micro-farm located in Agou-Nyogbo, at the foot of Mont Agou, in the Plateaux region of Togo.
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